Episode 21 : C’était au temps où Schaerbeek ramait…

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Deuxième partie : Prises de conscience – Episode 21

Nous rattrapons les autocars à la hauteur de Namur et les suivons  jusqu’au lieu de départ situé à Houyet. La descente fait 21 kilomètres et la durée est estimée à 5 heures, sans les pauses et le repas. Le soleil est au rendez-vous. Tout le monde embarque : chaque radeau (il y en a trois)  accueille une vingtaine d’enfants et nous avons loué une trentaine de kayaks biplaces pour les plus âgés. Place à l’aventure !

Je m’installe dans le même kayak que la journaliste de la DH. Je passe plus mon temps à naviguer à contre-courant pour ne pas perdre de vue les retardataires. Je vous épargne les détails. Sachez seulement que le lendemain je ne pouvais plus bouger mes bras !

Vers 12h15, nous organisons la pause repas. Les journalistes posent des questions aux jeunes participants sur leurs impressions. Le groupe n’est pas encore au complet. Certains ont perdu beaucoup de temps dans cette première partie de la descente. Et d’autres ont carrément coulé leur kayak (2 reviennent à pied) et il faut du temps pour les vider.

A 13h30, débute la seconde partie de la descente. Je me fais vite dépasser par les deux lascars qui avaient coulé leur kayak et à qui j’avais expressément demandé de faire le nécessaire pour être opérationnels pour cette suite de descente. Je vois alors sur la rive un couple de Hollandais qui hurlent. Je comprends immédiatement la situation : les deux compères ont piqué le kayak des Hollandais par opportunité. Je ne peux hélas rien faire sur le moment.

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La fatigue aidant, la deuxième partie fut plus laborieuse. Les kayaks doivent être souvent vidés de l’eau. Vers 15h30, j’accélère le rythme pour arriver le premier de façon à intercepter les premiers du groupe. Nous passons par le local douche prévu à cet effet.

La journaliste de la DH affolée sort du local en m’indiquant qu’on lui a volé son portefeuille. Je croise au même moment Yasmina (souvenez-vous l’épisode des cuistax lors de la sortie à Knokke). Je ne lui dis rien mais en mon for intérieur, je suis presque certain qu’elle est impliquée d’une manière ou d’une autre dans la disparition du portefeuille.

Nous séparons les jeunes qui étaient déjà arrivés à terre au moment où la journaliste a découvert l’absence de son portefeuille, des autres.

Un premier car repart vers Bruxelles avec ceux qui n’étaient pas présents au moment de la disparition. Pour les autres, nous leur demandons de chercher tous ensemble, avertissant que nous ne quitterons pas les lieux sans avoir retrouvé le fameux portefeuille. Les recherches ne donnent rien. Il faut se décider à rentrer, car les parents attendent à Schaerbeek. Je suis malgré tout très embêté vis-à-vis de la journaliste et lui propose de l’inviter à manger un bout sur le chemin du retour.

Je la dépose ensuite place Colignon où elle a laissé sa voiture. Lorsqu’elle ouvre la portière, un rectangle rouge en cuir en tombe. C’est son portefeuille…

J’en suis blême d’effroi. Elle s’en rend compte et s’excuse confusément. Je lui réponds que ce n’est pas auprès de moi qu’elle doit s’excuser mais du groupe de jeunes qui a poireauté en vain avant de rentrer pour chercher un portefeuille qui n’avait pas (fort heureusement) été dérobé. Quant à moi, je me sens vraiment mal car j’ai cru jusqu’au bout que Yasmina était impliquée dans cette disparition.

Je donne rendez-vous à la journaliste lundi 28 août à 11h30 à mon bureau. J’ai fait venir les jeunes restés plus tardivement à la Lesse. Nous avons prévu des sodas et quelques chips. Les jeunes me demandent « En quel honneur ? » Je leur réponds que la dame journaliste qui nous avait accompagnés a quelque chose à leur dire.

Avec grande sincérité, mêlée d’une gêne certaine pour sa méprise, elle s’excuse du désagrément occasionné. Je renchéris en expliquant que nous avons eu une mauvaise interprétation des choses, que nul n’est parfait et qu’il faut se méfier des conclusions hâtives.

Yasmina est assise et me regarde. Elle n’a pas pipé mot depuis son arrivée. Je vais m’asseoir près d’elle. Avec ses grands yeux, elle me lâche : « Vous étiez certain que c’était moi qui avais volé le portefeuille ». Je suis honnête et lui réponds par l’affirmative, tout en précisant que je le regrette amèrement.   J’ajoute à ma décharge « A Knokke sur le cuistax, tu as fait une connerie, maintenant c’est moi, nous sommes quitte ? »

Suite à cet incident, une estime réciproque est née entre une cinquantaine de jeunes dont cette gamine au caractère fort et très méfiante.

Cette expérience de vie me fait comprendre que des choses que l’on aurait pu croire impossibles peuvent malgré tout se réaliser. Une formidable leçon d’espoir. Et désormais, je me méfierai des préjugés hâtifs et des a priori. Les évidences ne sont pas si évidentes qu’il n’y paraît. Elles sont parfois bien trompeuses.

A demain.