Episode 31 : C’était au temps où Schaerbeek implosait…

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Troisième partie : Action consciente – Episode 31

Les jours qui suivirent le retrait de mes attributions furent décisifs pour l’avenir de Schaerbeek à plus d’un titre. J’en reviens à la personnalité de Léon Weustenraad, incapable de prendre une décision ou d’imposer son point de vue. Lorsqu’il accepta de retirer mes attributions, il pensait avoir ainsi rassuré le Collège et l’avoir ressoudé.

Il se trompait lourdement. En fait, c’est l’effet inverse qui est obtenu. Chaque membre du collège fonctionne désormais en roue libre et la collégialité est un vain mot. Chacun fait ce qu’il veut, comme il l’entend, sans tenir compte de l’avis des autres. Le résultat ? La cacophonie générale.

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Si l’on m’a enlevé mes attributions, je reste échevin et membre à part entière du Collège. Je participe donc aux réunions du Collège, comme par le passé. J’affiche un grand sourire de façade. Ces réunions sont épiques. Cela sent la fin de règne. Francis Duriau, président du CPAS, est quant à lui resté bien en marge de tout cet imbroglio. C’est un peu comme s’il observait la situation du haut du balcon.

En tout cas, il apparaît comme l’homme providentiel. Les deux dernières années ont été chaotiques, et Léon Weustenraad s’est révélé incapable de diriger la commune. Conformément à l’accord de majorité, Francis Duriau sera finalement proposé comme bourgmestre avec 24 signatures lors d’une réunion de majorité qui s’est déroulée le vendredi 28 juin 1991 en mon absence ainsi que celles de Léon Weustenraad et de Paul Toussaint. La succession ne se réalisera pas sans mal. Francis Duriau devra attendre le 13 avril 1992 (soit presque un an plus tard) pour être nommé bourgmestre. Un délai anormalement long. Nous en reparlerons plus tard.

La façon dont j’ai été mis de côté a de quoi me faire réfléchir sur le devenir de Schaerbeek. Cette commune a deux symboles : la cerise et l’âne. La cerise, car au XVIIe siècle, on la cultivait pour produire le lambic. L’âne, car toujours au XVIIIe siècle, il servait au transport de la cerise (on comptait à l’époque autant d’ânes que d’habitants). A cette période, force est de constater que Schaerbeek n’est pas cerise. Ce sont les ânes qui ont pris le pouvoir et sévissent.

Ainsi, dans les jours qui suivent mon retrait d’attribution, mes chers collègues ont dépensé une énergie inouïe pour détruire ce que nous avions mis en place.

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Tout d’abord, la fermeture de la maison du 99 rue de Jérusalem, qui accueillait « Atout projet » ainsi que la Maison de Jeunes « Le Stalag ». Deux jours suffisent pour déclarer l’immeuble insalubre et dangereux.

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Ensuite, on exige de moi le silence total, que ce soit avec les médias ou avec les associations schaerbeekoises. Je crois rêver lorsque j’apprends que le Collège a pris contact avec tous mes réseaux  associatifs, sponsors et de citoyens. En l’espace de trois jours, ils font de moi un véritable martyr.

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Le jeudi 18 avril, je dépose un recours à la Tutelle contre le retrait illégal de mes attributions.

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Pendant plus d’une semaine, on se réorganise vaille que vaille. Des bénévoles assurent la permanence à mon cabinet, un secrétariat est également installé à mon domicile pour accueillir dans de bonnes conditions d’autres bénévoles.

Les lettres de soutien et d’encouragement arrivent par centaines. Des anonymes mais aussi des personnalités. L’une d’elles qui m’a particulièrement touché : « Dites de ma part à vos collègues Echevins que ce n’est pas en fermant portes et fenêtres que l’on élude les tempêtes. Recevez tout mon soutien et courage. Arthur Haulot. » Pour les plus jeunes, Arthur Haulot décédé en 2005, était un poète belge qui fut un grand résistant, ayant été déporté à Mauthausen puis à Dachau.

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Les jeunes qui ont perdu leur local sont évidemment en colère. Mais j’insiste bien sur le fait que nous nous devons de rester calmes et surtout ne pas répondre de manière violente à la provocation. En définitive, le Collège n’attend que cela pour faire triompher sa déraison.

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Nous nous réunissons tous les jours devant le local fermé et préparons de nouveaux projets. « Atout projet » est relocalisé dans une autre commune. Je suis quasi toute la journée sur le terrain et reste en contact avec Didier Gosuin dont les conseils me sont très précieux. Les jours passent mais la pression reste intense à tous les niveaux, aussi bien médiatiques que politiques.

La date du prochain Conseil communal approche. Je n’y accorde pas trop d’importance. Belle erreur de jugement de ma part. Me présenter le lundi 29 mars au Conseil communal la fleur au fusil, sans deviner que je vais être cloué au pilori par le collège, est bien naïf. Car mes collègues avaient quant à eux très bien préparé ma mise à mort publique. Mise à mort durant laquelle une partie de l’opposition s’est empressée d’applaudir, ce qui fut pour moi presque insoutenable.

A demain