Episode 48 : C’était au temps où Schaerbeek se célébrait…

Troisième partie : Action consciente – Episode 48

Le service Etat-Civil-Population est réellement un laboratoire sociologique de l’évolution de la société. Avec le recul, les tendances qui se dégagent sont nettes. Lors de l’une de mes visites au cimetière de Schaerbeek, je prends le registre d’admission de l’année 1956, date d’ouverture du nouveau cimetière. Savez-vous qu’en 39 ans, l’espérance de vie des Schaerbeekois a augmenté de 30 ans ?

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Le cimetière est alors victime d’un terrible acte de vandalisme. Dans la nuit du dimanche 12 et du lundi 13 février 1995, 50 tombes de la parcelle 27 sont vandalisées. Cet acte honteux et gratuit fut heureusement isolé et unique.

J’ai beaucoup apprécié l’Etat civil. L’officier de l’Etat civil en effet célèbre les mariages, les centenaires mais également les différentes noces d’or (50 ans), de diamant (60 ans), de brillant (65 ans), d’albâtre (70 ans) et de chêne (75 ans). Je n’ai célébré le chêne qu’une seule fois en six ans !

Chaque célébration est émouvante. C’est la vie des gens et des couples que je découvre,  ce sont des années de vie commune pour le meilleur et parfois pour le pire que j’embrasse. A chaque fois, que ce soit à la Maison communale ou à domicile, c’est pour moi un plaisir et un honneur que d’officier et de représenter la commune.

Cela m’a d’ailleurs donné l’idée d’organiser une fois par an, dans le courant du mois d’août, une balade en voitures anciennes à travers la commune. Le projet s’est réalisé en étroite collaboration avec le Vétéran Car Club installé à la Maison des Arts, que j’ai découvert un peu plus tôt grâce à feu George Hasaert, mon collaborateur. Nous avons toujours pu compter sur la grande disponibilité des membres du club dont Lulu Stekelorum et son fils Pierre.

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Chaque couple de jubilaires qui le désirait était invité à l’une de ces balades sur le parvis de la maison communale. Il y avait alors une trentaine de véhicules ancêtres qui les attendait.

Un petit camion ancêtre accueillait quant à lui une fanfare avec des musiciens en canotier. La promenade automobile débutait à 13h30 sous escorte de la police. Nous passions par les plus belles artères de Schaerbeek. A 14 h, était prévu un premier arrêt au complexe sportif Terdelt, pour un morceau de tarte et un café. A 14 h30, nous étions en route pour le parc Josaphat où le service des Classes moyennes organisait tous les dimanches après-midis de juillet et d’août un concert au kiosque. C’était alors ce jour-là une ambiance guinguette. Les curieux étaient nombreux à venir admirer de plus près ces bijoux de la mécanique. A 17h, tout ayant une fin, nous repartions pour la maison communale où une petite réception était offerte aux propriétaires des véhicules, sans qui rien n’aurait été possible.

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Des journées comme celles-là me donnent l’énergie nécessaire pour poursuivre. Car ma tâche n’est pas des plus simples. On est parfois confronté à des situations inattendues !

Lors des mariages, on voit défiler toutes les composantes de notre société. C’était passionnant, malgré un côté à la chaîne, puisque le samedi se succédaient parfois jusqu’à 14 mariages. Pour rester enthousiaste et motivé du premier jusqu’au dernier, cela demande, vous pouvez l’imaginer, une énergie incroyable. Après les mariages qui se terminaient vers 13h30, je n’avais pas beaucoup de temps pour reprendre mon souffle, surtout durant les périodes de braderies.

Parfois un mariage peut réserver des surprises. Ils tournent alors à l’anecdote comme pour ce jeune marié qui n’était visiblement toujours pas remis de son enterrement de vie de garçon de la veille ! Mais parfois, ces surprises peuvent prendre un cours dramatique : je me souviens d’un marié fiché et recherché, que la police vint cueillir à la sortie de la Salle des mariages !

Enfin, il y a des « mariages-séparations ». C’était un samedi matin. Arrive sur la place Colignon un ballet de limousines plus somptueuses les unes que les autres. La plus belle s’arrête devant le perron de la Maison communale. La mariée en sort la première avec une mauvaise tête. Le marié suit et, tout à coup, j’entends la jeune femme hurler : « Imbécile, tu marches sur ma robe ! »

A la décharge du futur jeune marié, cette robe devait avoir 4 mètres de traîne. Je le vois devenir blanc de colère et lui rétorquer : « Si aujourd’hui tu me traites d’imbécile, je ne peux imaginer ce que ce sera demain ! »

Il remonte dans la voiture, claque la portière et l’automobile démarre. Il n’est jamais revenu… Je ne vous raconte pas les disputes dans l’heure qui suivit entre les familles déchirées.

Et puis, il y a aussi des situations qui vous bouleversent à tout jamais, comme ce samedi matin de mai 1995.

A demain.