Episode 110 : C’était au temps où Schaerbeek se brouillait…

Troisième partie : Action consciente – Episode 110

Avant de bifurquer en direction du Pont Van Praet, j’aperçois au loin une lumière bleue et tout à coup en l’espace d’une fraction de seconde un phare blanc fonce vers nous. L’impact est énorme, les airbags se sont déclenchés, laissant échapper une sorte de talc. Régine, mon épouse, et moi sommes totalement sonnés.

Ce que nous prenons pour de la fumée nous fait sortir du véhicule. Nous sommes en novembre et à 19h il fait nuit noire. De plus, une fine pluie tombe sur Schaerbeek.

Nous sommes en plein milieu du boulevard Lambermont où les feux sont repassés au vert. Autant dire que nous sommes en zone de danger. La patrouille de police qui suivait la moto, arrive à notre hauteur. J’entends hurler l’un des policiers, nous enjoignant de rester collés à notre voiture pour ne pas nous faire écraser.

Sur le moment, nous ne réalisons pas concrètement ce qui s’est passé. Mon épouse pensait que c’était le tram mais nous sommes seuls au milieu du boulevard avec certes des flux de véhicules qui eux continuent à rouler sur l’axe Lambermont. Je vois alors bien plus loin une personne au sol et des fragments, puis ce qui semblait avoir été une moto. Un jeune homme sur le trottoir me reconnaît et reconnaît aussi la personne au sol.

En l’espace de 10 minutes, tout bascule. Par gsm, le jeune homme prévient ses amis de l’accident. Il leur affirme que « l’échevin a fait bélier avec son auto pour aider la police » que N. essayait de semer…

En réalité, N. a pris peur en voyant la police derrière lui. La patrouille qui venait de quitter le commissariat de l’avenue Rodenbach, avait mis ses sirènes car appelée en intervention dans le quartier des fleurs. Paniqué, il a mis les gaz de son bolide 1000cc, a brûlé le feu rouge et a percuté à 150 km/h mon véhicule de face. 2 secondes plus tard, mon auto aurait été axée autrement et N. aurait percuté la portière passager. Je pense que nous aurions été tués.

Les plaques ne correspondaient pas à la moto, absence d’assurance et pas de permis pour cette cylindrée. Bref la totale. Au vu de la foule qui commençait à affluer, la police nous emmène au commissariat de l’avenue Georges Rodenbach. Nous sommes tous les deux en état de choc.

Assis pendant de longues minutes dans un couloir sinistre, nous assistons à une discussion entre un ancien gendarme et un policier (nous sommes alors aux balbutiements de la fusion des polices et cela se remarque d’emblée) sur la manière de gérer la situation et concrètement d’effectuer un croquis. Etant moi-même à bout de nerfs et souffrant de mes paumes de mains noires comme le charbon suite à l’impact avec l’airbag,  je demande de pouvoir souffler dans l’alcotest pour gagner du temps. Je n’avais fort heureusement bu que du jus d’orange au vernissage salle du musée. Le vin rouge communal étant pour les habitués, un véritable tord-boyaux…

Vu le temps qui passe et me trouvant toujours au centre de ce match de ping pong, je téléphone au Bourgmestre qui nous rejoint immédiatement. Je dois confier que je n’ai jamais été aussi content de ma vie de le voir. Cela a pacifié les choses entre les collègues policiers. Il faut dire qu’il s’était écoulé plus de 2 heures depuis l’accident et que nous n’en pouvions plus.

Vu que mon véhicule, pourtant une solide Chrysler Stratus, était en sinistre total avec le tableau de bord notamment fendu, nous sommes à pied. Bernard Clerfayt nous redépose bien aimablement chez nous.

Nous sommes conscients tous les deux qu’il s’en est fallu d’un cheveu…Mais les choses ne vont pas en rester là.

Le matin, l’Echevine de l’intégration Tamimount Essaidi (Ecolo) me téléphone pour me faire part qu’une rumeur s’est répandue et que des jeunes sont en colère en raison de l’état de santé de N. après l’accident.

Je peux compter sur mon chef de cabinet Faruk Bicici et mon ami Said Benallel qui connaissent tous les deux parfaitement le terrain schaerbeekois, pour prendre le pouls de la situation réelle.

Je suis aussi contacté par Françoise Schepmans alors échevine à Molenbeek qui a eu vent de l’affaire et qui se demande ce qui s’est réellement passé avec cette course-poursuite avec la police, qui en fait n’en était pas une.

Mais le comble, c’est lorsque le commissaire-divisionnaire David Yansenne en personne me téléphone à son tour. Il m’informe que les médecins sont très réservés sur l’état de santé de N. et me suggère d’aller quelques jours à la campagne « le temps que cela se tasse » !

Là, je me mets dans une colère folle et je hurle. Je lui explique si besoin que la veille circulant normalement en voiture, mon épouse et moi avons failli mourir parce que le jeune N. a brûlé un feu rouge à 150 km/h (le compteur était bloqué sur ce chiffre) avec, croyait-il, la police aux trousses, de surcroit sans plaque, sans permis, sans assurance avec sinistre total du véhicule et que c’est moi la victime qui devrait aller me cacher !

Plus tard dans la journée, l’oncle de N. me menace de mort au téléphone. Il me connaît car il est marchand ambulant sur l’un des marchés hebdomadaires de Schaerbeek. Il me rappelle lorsque Geert Pierre est à mes côtés et lui répète ses menaces. Ayant un témoin, je vais déposer plainte à la police ce qui me vaut une garde rapproché. N. s’en est finalement sorti. Compte tenu de l’impact, il a eu beaucoup de chance.

Dans autre registre, les égouts de la rue Navez s’affaissent et doivent être remplacés. Je me réjouis d’avoir pu convaincre mes collègues de céder notre réseau à la CIBE (aujourd’hui Vivaqua) car remplacer des égouts demande des budgets énormes.

Mon ami l’échevin de Ganshoren Jean-Paul Van Laethem avec qui j’avais fait campagne lors des élections régionales de 2004, rejoint la Bourgmestre Michèle Carthé (PS) avec sa section FDF. Cela provoquera son exclusion du FDF mais l’équipe qui l’a suivi se retrouvera dans la majorité au lendemain des élections de 2006.

Jules Van Gele alias Pogge remporte le titre de prince carnaval haut la main. Comme si une certaine prémonition me poussait à remercier les Schaerbeekois de s’être investis dans les campagnes de propreté de la commune, un calendrier « propreté » est distribué à tous les habitants.

A demain.