Portrait : Gisèle Halimi

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 A plus de 80 ans aujourd’hui, Gisèle Halimi fait partie de ces femmes pour qui le temps n’a aucune emprise. Il suffit de la voir lors d’interview, toujours aussi engagée, battante, parfois même rebelle, décidée, forte de ses convictions.

Née à La Goulette en Tunisie en 1927, Gisèle Taïeb entreprend après ses études secondaires des études de droit et de philosophie à Paris et entre au barreau de Tunis en 1949. Mariée en seconde noces à Paul Halimi dont elle prendra le nom, elle poursuit sa carrière d’avocate à Paris dès 1956.

Elle fréquente les artistes, les écrivains, l’atmosphère de Saint Germain des Prés. Gisèle Halimi est déjà à ce moment-là de tous les combats. Elle milite pour l’indépendance de la Tunisie, de l’Algérie voisine et n’hésite pas à dénoncer les tortures pratiquées par l’armée française. Elle sera l’avocate de plusieurs militants du mouvement national algérien.

Elle préside aussi une commission d’enquête sur les crimes de guerre commis par l’armée américaine au Vietnâm et sera souvent appelée à être observatrice judiciaire internationale lors de procès à l’étranger.

Amie de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir, elle fonde avec cette dernière en 1971 le mouvement féministe « Choisir la cause des femmes » et milite activement en faveur de la dépénalisation de l’avortement en France.

Dans la foulée, cette féministe convaincue signe le Manifeste des 343 (publié par le Nouvel Observateur) où les 343 femmes signataires déclarent avoir avorté et réclament la dépénalisation de l’avortement ainsi que le libre accès aux moyens de contraception.

Gisèle Halimi défend en 1972 une mineure Marie Claire qui a avorté après un viol. Le procès dit « de Bobigny » aura un grand impact au sein de la société française et favorisera l’adoption en 1975 de la loi Veil sur l’IVG (interruption volontaire de grossesse).

En 1978, suite au procès de 3 jeunes hommes qui ont violé deux jeunes femmes à Aix-en-Provence, elle parvient à modifier la loi sur le viol puisque celui-ci sera dorénavant jugé devant les Assises et non plus devant le tribunal correctionnel. 

En 1981, lors de l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir, Gisèle Halimi est élue députée à l’Assemblée nationale. Dès 1982, l’avocate-députée introduit un amendement permettant d’instaurer un quota pour les femmes lors des élections. Cet amendement sera voté à une très large majorité mais sera rejeté par le Conseil constitutionnel qui estimera que cela entrave « la liberté du suffrage et la libre expression de la souveraineté nationale. »

A la fin de son mandat en 1984, Gisèle Halimi est assez amère, déçue de la lenteur avec laquelle les projets qu’elle a initiés, avancent.

En 1985, elle est nommée ambassadrice de France auprès de l’UNESCO jusqu’en 1986. Elle occupera ensuite les fonctions de conseillère spéciale de la France à l’Assemblée générale de l’ONU en 1989 et rapporteuse au sein de l’Observatoire de la parité entre hommes et femmes dans la vie politique. Elle se présentera sur la liste de Jean-Pierre Chevènement en 1994 aux élections européennes.

Gisèle Halimi est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages à succès comme Djamila Boupacha avec Simone de Beauvoir (et couverture de Picasso), « La cause des femmes », « La nouvelle cause des femmes », « Avocate irrespectuesue » ou plus récemment en 2006 « La Kahina« .

Titulaire de nombreuses distinctions honorifiques comme la Légion d’Honneur et Docteur Honoris Causae de l’Université de Mons-Hainaut, Gisèle Halimi continue encore à ce jour à parcourir les universités européennes pour y tenir des conférences.

Il y a peu, Gisèle Halimi est revenue sur le devant de la scène médiatique car défendant l’idée d’une loi sur les signes ostensibles de religion à l’école. 

Enfin, sachez que cette femme engagée depuis plus de 50 ans, est l’une des rares femmes qui figure dans le « Dictionnaire des intellectuels français« , tout un symbole…