Portrait : Anna Politkovskaïa

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La journaliste russe Anna Politkovskaïa est née en 1958 à New York où ses parents diplomates travaillaient auprès des Nations Unies.

Après des études de journalisme à Moscou, elle débute sa carrière professionnelle en 1980 au journal Izvestia. Depuis 1999, elle écrivait des articles pour le journal en ligne Novaïa Gazeta.

Anna Politkovskaïa était connue pour ses prises de position sans concession à l’égard du Président Vladimir Poutine et de sa politique notamment en Tchétchénie.

En 2001, elle avait dû s’exiler en Autriche suite à des menaces de mort envoyées par e-mail. Ces messages l’avertissaient qu’un policier à propos duquel elle avait écrit un article, dénonçant ses actes illégaux, entendait se venger d’elle. Le policier sera finalement arrêté et condamné à 11 ans de prison.

Journaliste de terrain, elle se déplaça à plusieurs reprises en Tchétchénie pour couvrir le conflit et enquêter sur les pratiques de l’armée russe. Elle fut ainsi détenue plusieurs jours en 2001 dans le sud de la Tchétchenie pour avoir enfreint, selon l’armée les règles de sécurité en vigueur pour les journalistes. Menacée de viol et de mort au cours de sa détention, elle reçut dans la foulée le prix International Women’s Media Foundation 2002.

Anna Politkovskaïa se savait de plus en plus menacée suite à de nombreux articles qui pointaient du doigt les tortures et les exactions commises en Tchétchénie par l’armée russe. Ses articles ont été primés comme en 2002 par le Pen Club International et en 2003 par le prix du journalisme et de la démocratie décerné par l’OSCE. En 2004, elle reçut le prix Olof Palme pour les Droits de l’homme, prix qu’elle partagea avec deux compatriotes Sergey Kovalyov et Ludmila Alekseyeva.

Farouche défenseuse des victimes de la guerre en Tchétchénie, elle participera aux négociations lors de la prise d’otages du théâtre de Moscou en 2002, puis souhaita se rendre à Beslan en 2004 lors de la prise d’otages d’enfants dans un gymnase d’une école mais sur la route, elle sera empoisonnée en buvant du thé. Elle accusera les services spéciaux russes d’avoir par ce biais voulu l’empêcher de se rendre sur place.

La journaliste, maman de deux enfants, fut retrouvée assassinée dans la cage d’escaliers de son immeuble à Moscou le 7 octobre 2006, abattue de plusieurs balles.

Sa mort soulèvera une énorme indignation internationale. Ainsi, Jean-François Julliard de Reporters sans frontières déclarera : « Il est temps aujourd’hui de passer des mots aux actes pour que les incidents macabres que nous avons connus aujourd’hui ne puissent plus se reproduire. C’était l’une des rares journalistes indépendantes en Russie et elle s’était fait un nom. Elle voyageait souvent en Tchétchénie et avait publié un livre« .

Quelques jours après sa mort, un article qu’elle avait commencé à rédiger, fut publié dans le journal d’opposition Novaïa Gazeta, Anna y accusait une nouvelle fois les forces russes en Tchétchénie de recourir à la torture.

Son dernier libre intitulé « Douloureuse Russie » sorti en 2006 était un véritable réquisitoire contre Vladimir Poutine. Anna Politkovskaïa prérdisait que si une révolution venait à éclater en Russie, elle se terminerait en bain de sang.

Le parquet général de Russie investigue toujours le dossier de son assassinat. Dix personnes dont les noms n’ont pas été divulgués auraient été arrêtées, le commanditaire serait toujours recherché…

Plusieurs comités de soutien ont demandé à l’occasion du 1er anniversaire de son assassinat que le prix Sakharov lui soit décerné par le Parlement Européen. Or, ce prix ne peut être octroyé à un défunt. Pourquoi ne pas envisager un acte plus symbolique comme attribuer le nom de la salle de presse du Parlement Européen à cette farouche défenseuse des Droits de l’Homme ?