Portrait : Hélène De Beir

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J’ai découvert le personnage extraordinaire qu’est Hélène De Beir très récemment. C’est en effet à la faveur de la lecture d’un article dans un magazine relatif à la parution du livre « La femme héroïne« du journaliste du Soir, Alain Lallemand que j’ai appris à connaître la personnalité de cette jeune femme de 30 ans.

Aussitôt, j’ai souhaité en savoir plus et ai effectué des recherches sur internet. J’ai rapidement trouvé le site qui porte son nom www.helenedebeir.com. Les quelques photos issues de l’album familial correspondaient parfaitement à l’idée que je m’étais faite de cette jeune femme : une jeune femme érudite, cultivée, bien dans sa peau, épanouie, vivant pleinement son travail sur le terrain pour le compte de MSF, pleine de projets professionnels et privés, une jeune femme souriante et qui croquait la vie à pleines dents.

Hélène De Beir est née à Courtrai en 1974. Après des études en Relations internationales et en Droit à Bruxelles, à Bologne et à Washington, cette polyglotte s’est spécialisée dans l’humanitaire. Elle rejoint l’équipe de Médecins sans Frontières en Irak et en Côte d’Ivoire avant d’être envoyée en mai 2004 dans la province de Badghis en Afghanistan en tant que coordinatrice du programme de MSF.

Rapidement, Hélène tisse des liens avec les villageois et notamment avec les femmes. Grâce au programme de MSF, la tuberculose régressa de manière spectaculaire dans la province.

Le 2 juin 2004, Hélène accompagnée d’Egil Tynaes, médecin norvégien de 62 ans; Pim Kwint, logisticien hollandais de 39 ans; Besmillah, leur chauffeur afghan et Fasil Ahmad, leur traducteur se rend de Khayrkhana au village de Qala-I-Naw. Il leur faut environ 1h30 de route dans la montagne.

Le groupe est pris dans une embuscade. Tous seront assassinés par balles. Hélène allait avoir 30 ans 2 semaines plus tard et projetait de se marier…

Rapidement, il apparaîtra que ces meurtres sont le fruit du chef de la police locale, membre d’une puissante famille qui « tient » cette vallée si riche en opium. Mis sur la touche par le pouvoir de Kaboul, il a ourdi cette embuscade afin de créer un climat d’insécurité et se voir réintégrer dans ses fonctions puisque du temps où il était en poste rien ne serait venu perturber l’apparente tranquilité des lieux si ce n’est les trafics en tous genres liés à la drogue.

Suite à cette tragédie, MSF s’est retiré d’Afghanistan, un pays où l’association n’avait cessé d’être active que ce soit au temps des Soviétiques et même au plus fort de la guerre.

Le papa d’Hélène, Francis De Beir a aujourd’hui rejoint le Conseil d’administration de MSF. Agé d’un peu plus de 60 ans, il a souhaité après ce drame, donner un nouveau sens à sa vie. Depuis, il s’est déplacé au Zimbabwe, au Malawi, en Indonésie,… Il se réjouit d’avoir retrouvé une bande de jeunes gens animés du même esprit que sa fille. Il souhaite également s’investir afin de mobiliser les gros donateurs pour les futurs projets de MSF.

Il a pu rencontrer le Président afghan Hamid Karzaï lors d’une de ses visites officielles à Bruxelles. Ce dernier lui a bien confirmé l’identité du coupable de ces crimes et s’est engagé à le faire arrêter et le juger. C’était au printemps 2005. Quelques semaines plus tard, plusieurs suspects ont enfin été écroués et jugés. Deux d’entre eux ont été acquittés pour les 5 meurtres mais condamnés pour ne pas les avoir empêchés… Ils ont écopé de 1 et 5 ans de prison. Le principal suspect est quant à lui toujours en prison mais son dossier a été égaré… 

Aujourd’hui, la mémoire et l’idéal d’Hélène sont plus vivants que jamais : son papa a mis sur pied une bourse qui porte le nom de sa fille en collaboration avec l’Université Johns Hopkins et qui est destinée aux jeunes étudiantes d’un pays musulman qui aspirent à entreprendre des études de politique internationale, une plaque commémorative a été inaugurée à l’Université Johns Hopkins de Bologne où Hélène suivit des cours, idem à Washington et au Collège Aiglon en Suisse où un séminaire annuel permet désormais que des conférenciers viennent parler aux élèves de relations internationales et de l’humanitaire.

A Khayrkhana où MSF avait son poste, les villageois ont sculpté une stèle commémorative avec les noms d’Hélène et de ses compagnons. 3 ans après, les civils se souviennent encore de cette dynamique jeune femme aux cheveux d’or qui leur avait prodigué tant de soins.

Cette vie si brutalement stoppée par la folie de certains, ne s’est pas arrêtée le 2 juin 2004. Grâce à ses parents, sa famille, son fiancé et ses nombreux amis, qui ont mis sur pied ces bourses, ces prix, ces forums d’échanges et de discussion, ce n’est pas de haine, de vengeance, de ressentiment dont il est question mais de futur, de développement, de dialogues entre les communautés, entre les peuples. La poursuite d’une vie autrement mais une vie toujours aussi riche, intense et tournée vers les autres à l’image de cette jeune femme qu’était Hélène De Beir.

Lecture conseillée : « La femme héroïne » par Alain Lallemand aux Editions Luce Wilquin. Pour en savoir plus sur Hélène De Beir et sur les différents projets en cours : www.helenedebeir.com

(Copyright photo : www.helenedebeir.com)