Episode 33 : C’était au temps où Schaerbeek ressuscitait…
Troisième partie : Action consciente – Episode 33
Après l’annonce du retrait de mes attributions début avril, à part quelques proches, personne n’aurait misé un kopec sur mon retour sur la scène schaerbeekoise. Mais je ne suis pas resté à ne rien faire ou à pleurer sur mon sort. Grâce au soutien de nombreux bénévoles et de membres de « Bouton blanc », s’offre à moi un nouvel emploi du temps : fédérer les jeunes qui ont dû quitter le « Stalag » suite à la décision du Collège.
Lors de ma première réunion avec Laurence Spitaels, l’Event Manager chez Warner Bross, je joue carte sur table : le contexte politique, ma situation d’échevin sans attribution et le manque total de moyens financiers limitent fortement ma marge de manœuvre. Je détaille aussi mon parcours, mes relais et la confiance que j’ai établie au fil du temps avec les jeunes. Je lui explique également que beaucoup d’entre eux sont impliqués dans la mouvance Hip-Hop et possèdent des relais en Belgique mais aussi à l’étranger.
Laurence me dit avoir apprécié ma franchise. Les moyens de la Warner Bross sont conséquents : 2 millions de francs belges pour toute la communication liée à la promotion du film et des « events » qui en découleront.
Nous nous revoyons avec les jeunes du Stalag pour faire le point. Il s’agit d’examiner dans quelle mesure ils peuvent s’impliquer dans le lancement en avant-première européenne à Brxuelles du long métrage. Le sujet ne peut que nous interpeller puisque le film « New Jack City », avec Wesley Snipes à l’affiche, relate l’histoire de deux policiers, l’un d’origine africaine, l’autre d’origine italienne. Tous deux ont souffert de la drogue pendant leur enfance et se battent à présent pour démanteler le réseau du redoutable Nino Brown, qui règne sur Harlem, quartier de New York à l’époque en proie à beaucoup de violences et de zones de non-droit.Les jeunes sont enthousiastes.
Dans le courant du mois de mai, la tension en rue est palpable dans différentes communes bruxelloises : Molenbeek, Anderlecht, Saint-Gilles mais surtout à Forest. Il y a des émeutes. Je les questionne franchement : la diffusion de ce film dont le thème (l’affrontement entre la police et des jeunes embrigadés dans des bandes et mêlés à un réseau du trafic de drogue), a suscité de nombreux remous aux USA. Ne risque-t-elle pas de générer des tensions voire de donner le prétexte à des émeutes à Bruxelles ? Les jeunes, visiblement sûrs d’eux, me confirment que tout devrait parfaitement bien se passer.
L’idée est d’organiser, en marge du lancement du film, un grand événement de portée internationale aux Halles de Schaerbeek. Avec ouverture des portes à 18 heures et démonstration de graffs en atelier. Sur le podium, un concert où se succèdent 9 groupes. Le tout suivi d’un débat-échanges, dans la petite halle. Ensuite, le gros morceau : la diffusion en avant-première du film « New Jack city ». La soirée se termine avec un DJ. Les jeunes sont satisfaits de ce timing et on se quitte dans l’allégresse.
Nous nous répartissons les tâches pour la promotion du long métrage. L’un des groupes va s’occuper de la programmation avec le soutien de trois rappeurs professionnels. Les autres groupes travailleront sur la diffusion des affiches.
Il a été convenu que tous les bénéfices de l’événement reviendraient aux jeunes afin de leur permettre d’organiser d’autres activités de quartier. Avec 20 jeunes et les 3 rappeurs, nous rencontrons le patron belge de la Warner Bross. Un moment assez surréaliste mais qui a permis à chacun de se s’apprécier. Nous sommes fin prêts pour le lancement de cette incroyable aventure.
Le ciel commence enfin à se dégager, et l’horizon réapparaît. Tout cela donne l’envie d’aller de l’avant.
A demain.