Un règlement quant à l’usage de l’outil informatique qui pose question

A l’ordre du jour du Conseil communal de ce 31 mars 2010, un règlement relatif à l’usage de l’outil informatique dans l’administration communale proposé par la majorité MR-Ecolo.

Si le groupe PS est évidemment d’accord sur l’objectif d’un cadre réglementaire, plusieurs points posent solidement question quant à la balance entre le droit au respect de la vie privée et la responsabilité d’un agent de l’administration communale.

Un règlement qui selon la bourgmestre f.f. et l’échevin des Ressources humaines, Etienne Noël (MR-PRL) a longuement été discuté en interne et a la totale approbation des syndicats. J’avoue avoir été abasourdi d’entendre cela surtout à la lecture entre autres de l’article 17 de ce règlement.

Perplexe aussi quant aux motivations avancées par l’échevin de l’Informatique Frédéric Nimal (MR-FDF) : afin de résoudre les problèmes récurrents d’informatique et à la demande du personnel qui souhaitait bien déterminer ce qu’il était possible ou non de faire… Perplexe car pour en avoir parlé avec plusieurs fonctionnaires de services différents, quasi personne n’était au courant de ce que le Collège avait concocté…

Si dans les grandes lignes, le règlement ne pose pas de problème comme par exemple ne pas utiliser internet en dehors des pauses et de l’heure de table, de même que les sites Facebook ou Twitter, …il est totalement inadmissible que les mails des agents soient conservés pendant une durée de 3 mois !!!

Des mails qui seront donc gardés sur le serveur pendant 3 mois. Il nous a été assuré qu’on ne pouvait à ce stade-là pas déterminer à qui ils appartiennent, toutefois comme précisé à l’article 17 « Si l’administration présume un usage anormal ou interdit du système de courrier électronique, elle procèdera sur proposition du responsable du traitement et de la sécurité (un fonctionnaire d’un département dont on se demande bien qu’elle est la légitimité que pour jouer de la sorte au grand censeur vis-à-vis de ses collègues)  à l’identification du travailleur concerné. » Que l’on ne fasse dès lors pas croire que lors du stockage, ces mails dorment tranquillement en tout anonymat !

Autre point nébuleux : les sanctions. Il est prévu qu’en cas de faits illicites ou diffamatoires ou de violation « des intérêts économiques et financiers de l’administration » (tout cela est quand même très vague), l’administration peut « retracer directement l’identité du ou des responsables de l’anomalie, sans phase préalable d’avertissement« . Par ailleurs « des sanctions administratives (lesquelles ???) appropriées seront prises ». Deux problèmes : d’une part il n’y a aucune procédure qui permette à l’agent de se défendre (ce qui est inacceptable dans un Etat de droit) et d’autre part, la sanction n’est pas clairement définie ce qui n’est pas acceptable non plus.

Le groupe PS par la voix de la conseillère communale Laurette Onkelinx a fait état de ses plus vives craintes quant au respect de la vie privée des agents communaux. A la question de savoir si d’autres communes avaient adopté pareil règlement, il semble que Schaerbeek soit pionnière en la matière.

Laurette Onkelinx a demandé un avis auprès de la Commission de la protection de la vie privée qui doit d’ailleurs remettre prochainement un avis général sur la question vie privée/vie professionnelle par rapport à internet.

Malgré l’impatience de Bernard Clerfayt (on sait bien que c’est avec les braconniers que l’on fait les meilleurs gardes-chasse) qui souhaitait l’entrée en vigueur du règlement en l’état dès à présent, la bourgmestre f.f. plus consensuelle approuva la proposition du groupe PS. Le règlement a donc été adopté sauf l’article 17. Celui-ci entrera en vigueur éventuellement modifié (mais une nouvelle discussion à ce sujet aura alors lieu au Conseil) dans les 3 mois de la demande d’avis de la commission de protection de la vie privée.

Au final (et cet article n’est malheureusement pas un poisson d’avril…), je m’interroge sur l’empressement et les motivations réelles du Collège. Est-ce opportun de réglementer à outrance et surtout de surveiller à la limite de l’Inquisition le personnel communal ? Tout cela me laisse quand même un sentiment très malsain avec des perspectives de règlement de compte, de chasses aux sorcières et tout simplement d’ambiance de suspicion entre le Collège et son administration. Lamentable et regrettable.