Episode 146 : C’était au temps où Schaerbeek s’en allait…

Troisième partie : Action consciente – Episode 146

Le petit monde du folklore bruxellois et schaerbeekois perd en quelques jours en janvier 2015 deux de ses piliers : Julo I, empereur carnaval de Schaerbeek et patron du groupe des « Pogge » puis Toine, président du Meyboom. A titre personnel, le Meyboom, entre temps classé au patrimoine mondial immatériel par l’UNESCO, n’est clairement plus ce qu’il fut.

Il ne règne plus cette ambiance bon enfant rythmée par des coups de gueule, toujours temporisés par notre Toine. Une nouvelle génération est entrée au sein du groupe et les vieux de la vieille, véritables bas-fondistes ont progressivement disparu.

Au PS, la législature 2012-2018 est marquée par une valse des départs des mandataires : Mohamed Lahlali qui fut député bruxellois et échevin de l’Instruction publique de 2000 à 2006, prend sa pension. Un au revoir chaleureux et émouvant lui est rendu au Conseil communal. Son départ permet à Bernadette Vriamont (Sp.a) de retrouver un poste de conseillère communale.

Elle quitte donc son mandat de conseillère CPAS où elle est remplacée par Christiane Catherin, une militante très engagée et active, une femme de convictions très à l’écoute. Un casting parfait.

Catherine Moureaux, qui a beaucoup apporté à notre groupe de par ses interventions au Conseil, nous quitte aussi pour reprendre les rênes de la section PS de Molenbeek en vue des communales de 2018.

Pendant de longs mois, le siège d’Halis Kokten est vide lors des séances du Conseil. L’homme n’a pas digéré, et on peut le comprendre, d’avoir probablement raté suite au bug informatique son élection en tant que député régional bruxellois. Il finira par revenir mais siègera alors en tant qu’indépendant.

Mars 2016, c’est le terme de mon mandat comme président de la section PS de Schaerbeek. Yves Goldstein, notre chef de groupe au Conseil, m’explique qu’il souhaite reprendre la section dans la perspective des élections de 2018. Je fais alors le choix de ne pas me représenter, permettant ainsi que nous nous positionnions d’emblée en ordre de bataille derrière Yves et Laurette pressentie pour être deuxième.

Une nouvelle équipe est mise en place qui fourmille de projets et est très axée sur la communication. Je dois confier que ne plus être à la tête de la section n’ébranle nullement mon amour propre car comme je l’ai déjà expliqué, c’était un « job » très prenant, surtout en préparation de nos assemblées et comités. Au cours de mon mandat avec bien entendu mes camarades du comité à mes côtés, nous avons permis que la section soit pleinement sur les rails en vue de cette échéance électorale. Des fichiers mis à jour (cela semble simpliste et pourtant vous seriez étonnés de l’état de ceux-ci dans les différentes sections tous partis confondus) et surtout une trésorerie assainie grâce à la détermination et à l’endurance d’Anna Colombo.

De ce côté-là, aucun souci mais j’ai trouvé et si je l’écris c’est que ce ressenti n’était pas stricto sensu uniquement personnel, que l’on a un peu rapidement tourné la page de ces années de présidence, qui furent des années de transition entre une nouvelle cure d’opposition débutée en 2012 et la perspective d’intégrer peut-être une majorité en 2018.

A ce titre-là, je pense aussi aux militants de base pour qui cela n’a pas été facile toutes ces dernières années à Schaerbeek. Il faut pouvoir garder le cap et le moral lorsque les résultats sont bons mais que l’on ne décroche pas le sésame tant convoité. Il faut être pleinement convaincu par les idéaux défendus par le PS pour essuyer les critiques, parfois même les agressions verbales lors des campagnes. Je pense en effet à tous ces militants toujours mobilisables pour un tract, une festivité. C’est pour eux que j’ai toujours eu le plus d’admiration et de respect.

Yves Goldstein, qui a longtemps travaillé avec Laurette Onkelinx au fédéral et qui est à nos côtés sur Schaerbeek depuis 2006, est entre temps devenu Secrétaire du Gouvernement régional bruxellois. L’homme maîtrise à la perfection tous les grands dossiers qui auront aussi des impacts sur notre commune : le tracé du métro, la Cité des Médias, le site de la gare Josaphat,…

Moins d’un mois après avoir été élu à la tête de la section PS, il est l’objet sur les réseaux sociaux d’une très agressive campagne après que le New York times a exhumé une vidéo d’une table ronde organisée le 20 mars 2016 dans le cadre du German Marshall Fund’s Brussels Forum 2016 en présence notamment de l’ancien juge anti-terroriste Jean-Louis Bruguière.

Yves Goldstein parle d’amis enseignants lui ayant rapporté que dans leurs classes « 90% des élèves âgés de 17 ou 18 ans, considéraient les terroristes de Paris comme des héros ». Pour une partie des membres de la section PS, ces propos sont totalement stigmatisants par rapport à une communauté.

Ces propos sont à remettre dans le contexte global de cette rencontre où Yves Goldstein nuance et remet en perspective l’intégration à Bruxelles. Mais pour certains élus du PS schaerbeekois, il a semblé plus opportun de faire part de ses critiques sur les réseaux sociaux plutôt que d’avoir une franche explication en interne. Cet épisode a indiscutablement créé des tensions et laissé des traces.

Certains propos blessent visiblement l’homme dont on a l’impression quand on ne le connaît pas qu’il est en définitive un robot tellement il peut abattre du boulot.

Lors de la veillée du 1er mai 2016 qui se tient aux écuries van de tram rue Rubens (un ancien entrepôt de la STIB place Pogge qui abrite un marché bio, des apéros et concerts et qui sera ensuite loué par la Commune dans le cadre du contrat de quartier), je le vois moins festif que d’habitude, lui qui est le premier à faire la guindaille.

Mon épouse lui parle pendant quelques minutes lorsqu’il s’occupe dans la cour du barbecue de la soirée. Clairement, des mots prononcés par certains ont laissé des traces. Déjà en 2012, Yves Goldstein avait fait l’objet d’une inadmissible campagne antisémite qui avait provoqué la tenue d’une réunion d’urgence au boulevard de l’empereur au siège de la fédération bruxelloise où toute l’équipe en lice pour les communales de 2012 lui avait apporté son total et entier soutien.

Nous apprendrons peu après son choix de se retirer de la vie politique locale, de quitter son poste au gouvernement bruxellois pour se consacrer à la mise en place du musée d’art contemporain de Bruxelles « Kanal » dans l’ancien siège Citroën. Un choix qui déstabilisa, il ne faut pas s’en cacher, notre section.

Il y a des moments où des opportunités surgissent, comme pour Yves Goldstein, de se réorienter. Il faut pouvoir alors se positionner et penser à soi, à son bien-être.

Après sa démission du Conseil communal, je n’ai plus eu de contact avec lui. Il était désormais passé à autre chose après avoir donné énormément d’énergie, souvent dans l’ombre, pour Schaerbeek.

A demain.