Episode 19 : C’était au temps où Schaerbeek vivait…

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Deuxième partie : Prises de conscience – Episode 19

Nous sommes le vendredi 14 juillet 1989 et il est 10h30 lorsque je gare ma voiture sur le parking du Zwin, la réserve naturelle située près de Knokke. Lorsque je m’approche des deux autocars qui ont emmené le matin les jeunes de Schaerbeek en excursion, je constate une agitation anormale. Je me dirige vers le groupe et vois une jeune animatrice en pleurs. On m’explique rapidement qu’au cours du voyage, son sac à main a disparu et que dix jeunes dont cinq de la même famille se sont éclipsés, à peine arrivés à Knokke.

Mon sang ne fait qu’un tour. Je fais remarquer à la monitrice qu’elle n’a pas à laisser traîner son sac et aux autres moniteurs qu’il est inadmissible de ne pas avoir vu plus tôt que 10 jeunes manquaient à l’appel. Avec un responsable de l’une des associations partenaires, nous  partons en voiture à la recherche de nos jeunes. Après 20 minutes, nous les retrouvons…  à pédaler sur 3 cuistax.

Je me mets alors dans une colère noire, ce qui ne m’arrive pas souvent. Je crie et les menace d’appeler la police. Visiblement impressionnés par ma grosse voix, tout ce petit monde s’apaise et décide de filer doux. Nous restituons les cuistax et rejoignons le groupe.

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De retour aux autocars, je trouve les jeunes très agités. Mon expérience chez les scouts pendant de nombreuses années me sert à ce moment précis. Les jeunes sont vraiment très nombreux et j’imagine mal qu’ils puissent tous visiter ensemble la réserve. Je prends alors la décision de scinder le groupe en deux : les enfants de 3 à 12 ans, encadrés par les associations, iront au Zwin tandis que les 40 autres partiront avec moi et quelques animateurs faire une promenade sur la plage.

La balade est conséquente : nous avons marché du Zwin à Zeebruge (avec retour au point de départ) pas moins de 23 kilomètres. Au cours de nos arrêts notamment lors du pique-nique, nous prenons le temps de discuter les uns avec les autres et de faire plus ample connaissance. L’ambiance devient progressivement bien plus détendue et conviviale. A 17h, tout le monde rembarque dans les cars pour un retour qui s’effectue sans problème.

Le lundi suivant, je suis présent lors de l’ouverture de la plaine Rasquinet. A leur arrivée, j’interpelle les frères Khaloua, chahuteurs de service qui sont présents sur le site depuis le début du mois de juillet mais qui n’avaient pas pris part à l’excursion au Zwin.  Ils me donnaient beaucoup de soucis.

Je leur demande de m’accompagner à mon bureau à la maison communale. Ils acceptent mais je les sens méfiants et inquiets. Enfin installés, l’un d’entre eux me demande ce que je leur reproche concrètement. Ma réponse fuse : « Rien mais je souhaite vous poser une question ».

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En fait depuis le début d’ « Eté jeunes », je les observe et j’ai pu constater au fil des jours qu’ils sont certes très sympathiques, mais ils ont un don particulier pour « foutre le b… » en un minimum de temps. Je leur demande si, avec leur expérience, ils ne pourraient pas m’aider en faisant en sorte que les jeunes participant aux activités ne fassent pas des bêtises. Ils se regardent, surpris et interrogatifs. Je leur réponds : « Si votre réponse est positive, je vous engage comme animateurs pour les six semaines qui restent, avec bien sûr une semaine d’essai ».

J’ai tapé dans le mille ! Les semaines suivantes furent un véritable plaisir. Mes quatre jeunes moniteurs étaient sans doute sans expérience, mais ils étaient dotés d’une solide connaissance du terrain et ils possédaient une autorité légitime naturelle vis-à-vis des autres jeunes. Ce fut un réel bonheur que de les voir fonctionner de la sorte. Le début d’une grande complicité entre nous !

Un matin de début août 1989, je suis contacté par un  habitant du quartier Renan. Il m’informe que des affiches rouges (elles annoncent une enquête publique d’urbanisme) ont été affichées dans le quartier. Elles concernent l’implantation d’un manège équestre… sur le site Renan. Devinez qui est à l’initiative du projet ? L’échevin Claude Paulet.

Mon sang ne fait qu’un tour : les jeunes utilisent cet espace pour jouer au football et au basket. Y implanter un manège équestre signifie la fin des activités pour les jeunes. Je soupçonne de la pure provocation. Je ne tarde pas à apprendre que Claude Paulet a profité du manque d’autorité du nouveau bourgmestre et de mon absence au Collège du mardi 4 juillet (car j’étais accaparé par la mise en place d’Eté Jeunes) pour faire passer son projet.

En quelques heures, nous allons mettre en place une réaction citoyenne qui sauvera le site Renan. A demain.